Quand quatre musiciens du milieu des eighties ont les yeux tournés vers la fin des sixties
Rédaction : Apollonios le 3 février 2025
L'héritage du Velvet Underground sur le milieu rock et Spacemen 3
Le Velvet Underground a laissé une trace indélébile fomentant toute l'histoire du rock alternatif (à définir ici plutôt en termes d'approche artistique qu'en genre spécifique), à tel point que ce dernier n'aurait aucune existence propre sans les illuminations psychédéliques, expérimentales, tumultueuses, et dissonantes de la légende de de la côte-est américaine, un temps affiliée à la célèbre "Factory" d'Andy Warhol. Que serait la primitive scène punk rock new-yorkaise sans la spontanéité stellaire de Lou Reed et John Cale ?
De Patti Smith (dont Cale à produit le premier album) à Sonic Youth, en passant par les New York Dolls, Suicide, Richard Hell et l'anthologie produite par Brian Eno (également très influencé), No New York, le Velvet Underground a su aussi s'immiscer dans toutes les substances marginales du rock. Les Stooges (Cale aux commandes de leur culte offrande éponyme), ou encore Jonathan Richman des Modern Lovers (Cale, une fois de plus producteur de leur seul recueil...), en sont très tributaires. Avec Sonic Youth, comptons de plus Dinosaur, et enfin... Nirvana (qui a repris "Here She Comes Now"). Insérons aussi le "krautrock" allemand d'Amon Düül II, Can et Neu!, qui doivent largement au Velvet. La liste est longue.
Avec l'épicentre californien du "Paisley Underground" (Dream Syndicate, Rain Parade, Opal, puis plus tard Mazzy Star) le Velvet a ravivé les engouements psychédéliques des sixties. Dans les années 80, Jesus and Mary Chain, My Bloody Valentine, ou les Cocteau Twins en diront autant, ceux-ci étant à l'avant-garde du très Velvet style appelé shoegaze. Durant la même décennie, affiliés à cette démarche, où se croient distorsion et féérie hallucinatoire, Spacemen 3 émerge. Ceux-ci ont ensuite été mentionné dans le développement du renouveau du psychédélisme au sein du post-punk, suivant en cela Siouxsie and the Banshees et les Psychedelic Furs. Cette volumineuse introduction nous parait essentielle afin de comprendre le paysage musical dans lequel ont évolué les anciens Spacemen.
The Spaceman 3 ou "Les hommes de l'espace", les origines du groupe
Le groupe est formé en 1982 à Rugby, à l'est du Royaume-Uni par deux amis de 16 ans ; l'essence de Spacemen, 3 : Peter "Sonic Boom" Kember et Jason "J. Spaceman" Pierce. A l'origine dénommé The Spacemen, le "3" sera bientôt arboré par un concours de circonstances aléatoire, dans un souci purement esthétique. Après quelques marques dessinées par d'occasionnelles performances live, c'est en 1984 qu'une initiale démo voit le jour, les hommes de l'espace étant composé d'un trio. Cet essai, réédité en 1995 par Sympathy for the Record Industry (le label qui propulsera les White Stripes !) nous ouvre les racines de nos anglais, situées entre (bien évidemment) le Velvet Underground, les Stooges, The 13th Floor Elevators, et le blues britannique des Rolling Stones ou Pretty Things à leurs débuts. "Fixin' to Die" est une reprise de Bukka White !
Dès 1985, Spacemen 3 se forgera une bonne réputation locale, qui parviendra aux oreilles impressionnées de Pat Fish, du groupe Jazz Butchers, signés chez Glass Records (où résidaient The Pastels), maison de disque indépendante qui offrira un contrat à la bande à Sonic Boom et J. Spaceman. Ce Pat Fish les encouragera l'année suivante, après avoir recomposé l'équipe en quatuor (leur premier bassiste se joindra de nouveau à eux), à enregistrer une seconde démo, "Taking Drugs to Make Music to Take Drugs To", dont le nom décrit parfaitement la philosophie et coloration de l'esprit artistique du duo de Rugby. Le membre de Jazz Butcher fera écouter cette maquette à Glass Records, et de leur collaboration sera suscité le désormais culte "Sound of Confusion".
Quelle saveur possède la confusion sonore ?
Initialement insatisfaits du travail impliqué sur ce disque, et plutôt tournés vers les résultats de leur seconde démo, cela n'a pas empêché à "Sound of Confusion" d'être progressivement reconnu et glorifié par les communautés et le public alternatifs. Cet album est largement crédité dans la conception du shoegaze, dans l'évolution du noise rock, et dans le renouveau du space rock. Ainsi, on retrouve dans ces quarante minutes diverses influences, telles que toutes celles citées plus haut concernant leurs démos, en ajoutant en outre Hawkwind (pour le côté "space" et "garage"). Depuis le préliminaire "Loosing Touch With My Mind" jusqu'au final "O.D. Catastrophe", on assiste à un magnifique mariage entre le Velvet, les Stooges, et Hawkwind. Sensiblement, c'est surtout le Velvet Underground qui coule dans les veines artistiques de nos hommes de l'espace. "Hey Man" ressemble à "Heroin" en plus punk ; "Rollercoaster" est une réactualisation des 13th Floor Elevators ; "Little Doll", excellente récupération des Stooges, qui vient accentuer le puissant hommage rendu par le style de nos anglais. L'attention portée au blues est toujours présente, avec "2:35", puis "Mary Ann", reprise de "Just One Time" de Juicy Lucy, formation blues rock largement occultée au fil du temps. Sauf le titre d'ouverture et "Little Doll", chaque morceau vient des deux démos précédentes.
Bien que la critique ira priser davantage leur deuxième effort de 1987, "The Perfect Prescription" (présenté par le groupe comme un véritable "trip" musical), c'est selon nous "Sound of Confusion" qui encapsule à merveille tout le talent des âmes de Sonic Boom et J. Spaceman. Soutenu par une langoureuse distortion, des mystiques tambourins, et les résonances vocales de J. Spaceman, ce premier album peut-être considéré comme une des plus réussies progénitures des Stooges et du Velvet Underground. En fin d'année 1986, l'excellent EP "Walkin' With Jesus" est délivré, et confirme le statut de Spacemen 3 comme continuation rafraichissante du Velvet. De plus, ce son noisy si caractéristique sera à la même période joué par Jesus and Mary Chain et My Bloody Valentine ou encore Loop, ouvrant la porte à l'indie rock et au shoegaze. Nos deux anglais donneront fin à l'aventure en 1991 après au moins deux ans de discorde et de tensions. J. Spacemen va bouleverser le milieu space rock avec Spiritualized, allant notamment influencer The Verve. "Sound of Confusion" (à coupler de préférence avec l'EP "Walkin' With Jesus") reste pour nous un témoignage de "punk aérien", arrivant avec inspiration à capturer l'essence des sixties pour la retranscrire dans les eighties.
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Manifestant les fruits de sa plume insatiable, laquelle touche aussi la poésie et la philosophie, Hariss est avant tout un grand passionné de toute sonorité émergeant autour de la guitare, allant, dans une certaine mesure, jusqu’à porter un intérêt pour l’histoire et l’organologie des instruments à cordes pincées. Plus particulièrement, il est attiré par ce qu’a produit la guitare telle qu’on la connaît aujourd’hui, c’est-à-dire depuis les fondations de l’industrie musicale moderne. Blues, folk contemporain, rock, et métal, tout passe par le crible de son expression écrite. A travers son pseudonyme, il tire les lumières de ses lettres par son âme tournée vers Apollon, ce dernier étant connu pour donner souffle et naissance à l’art de la musique.