Le rock, un truc de mecs pour les mecs ? Et si le rock'n'roll avait fait ses premiers riffs avec l'acte électrique et révolutionnaire de Rosetta ?
Face aux clichés testostéronés, les femmes réinventent le désir et s'inscrivent au cœur du récit rock. Si le rock'n'roll se raconte à rebours de tous les codes sur la beauté, rares sont les livres d'histoire mentionnant les femmes qui font du bruit.
Au début des années 1970, l'historienne Michelle Perrot inaugurait un cours intitulé « Les femmes ont-elles une histoire ? ». Il semble légitime de se poser la question : existe-t-il une spécificité féminine dans le rock ? Près de 50 ans plus tard, cette interrogation subsiste en toile de fond. Courtney Love, Patti Smith, PJ Harvey, Janis Joplin, Nico, Aretha Franklin, Tina Turner, Poly Styrene, Tobi Vail, Corin Tucker ou encore Ana Da Silva… des décennies de muses ont fait changer de peau le rock'n'roll. Une mue qui a commencé en 1948, alors qu'Elvis n'avait que 13 ans.
Sister Rosetta Tharpe, exécute cette même année 1948, un geste révolutionnaire en empoignant une guitare électrique. Pionnière du rock, c'est elle qui a l'intuition de mélanger gospel, blues et électricité. Erica Manzoni déclare : « Rendons à Rosetta ce que l'on croyait appartenir à César. Sans Rosetta, pas de Little Richard ni de Chuck Berry ».
Ces grandes figures féminines du rock ont empoigné non seulement leur guitare mais aussi leur histoire et la parole. A l'instar d'Aretha Franklin qui transforme "Respect" d'Otis Redding en hymne féministe, les femmes n'ont pas demandé l'autorisation, elles l'ont prise. Cette façon d'exprimer son désir de manière incarnée dans le rock s'est distillée dans la société entière jusqu'à en faire bouger les murs.
« Le jour où les femmes se sentiront autorisées à exprimer leurs désirs, elles ne seront plus des proies. » Belinda Cannon (tribune du 9 janvier 2018, le Monde)